Les tombes Liao et Jin (Xe-XIIIe s.) du bassin de Ke’erqin (Nord-est de la Chine)

Mercredi 17 janvier 2018 : Les tombes Liao et Jin (Xe-XIIIe s.) du bassin de Ke’erqin (Nord-est de la Chine), conférence par Pauline Sebillaud, chargée de recherche au CNRS CRCAO, chargée de cours au Centre de recherches sur l’archéologie des frontières, département d’archéologie, université du Jilin, Chine.

Pauline Sebillaud présente deux tombes qui ont fait l’objet de fouilles de sauvetage dans la province de Jilin au Nord-Est de la Chine actuelle.

L’empire Liao (907-1125) et celui des Jin (1125-1234) ont été contemporains de la dynastie des Song (960-1279) et les Jin ont envahi le Nord de la Chine forçant les Song à se replier au Sud du Yangzi Jiang.
Les quelques tombes mises au jour et publiées sont généralement les sépultures de l’aristocratie mais beaucoup n’ont pas été publiées. La position géographique marginale de la province, au centre de la Mandchourie, est loin des préoccupations majeures de l’archéologie chinoise et loin aussi de la sphère culturelle traditionnelle chinoise. Quelques publications ont été faites en Anglais, essentiellement par Dieter Kuhn et Nancy Steinhart.

Les deux tombes dont il va être question ont été fouillées par l’Institut archéologique de l’université de Jilin, province située au Nord de la Corée du Nord.

Zone d’occupation de l’empire Liao. 10ème s.

Zone d’occupation de l’empire Jin. 11ème s.

Les deux sites dans la province de Jilin.

Le bassin de Ke’erqin est une vaste dépression recouverte, dans l’antiquité, par des prairies et des marécages qui ont été asséchés petit à petit. Il a été occupé depuis l’époque Néolithique et peuplé par de nombreux groupes de populations différentes ayant des religions et des pratiques funéraires distinctes. Au Moyen Âge, ce sont essentiellement des peuples nomades et les Khitan fondent le premier empire avec la dynastie Liao.

La première tombe est à Dongmengyi, Shuangliao, où une première tombe avait été pillée en 1986. Quand une seconde tombe a été découverte en 2016, l’Institut de recherches archéologiques de la province du Jilin a envoyé une équipe d’archéologues. Ce type de tombe à chambre en briques est assez classique : creusée dans une fosse avec une rampe d’accès, la tombe proprement dite est une structure en briques construite au fond, et qui a été ensuite recouverte de terre. Près de la fosse, un assemblage de briques protégeait une jarre à couvercle. La chambre funéraire était couverte par un dôme pyramidal constitué de briques disposées en encorbellement mais avec une «clé de voûte» faite avec des briques disposées sur chant.

Tombe de Dongmengyi. L’assemblage de briques protégeant la jarre couverte.©P.Sebillaud

Tombe de Dongmengyi. L’entrée obturée. ©P.Sebillaud

Tombe de Dongmengyi. Vue de la chambre. ©P.Sebillaud

La chambre était précédée d’un corridor d’entrée et d’une rampe d’accès avec des marches. L’entrée du corridor avait été murée. A l’intérieur de la chambre funéraire, les archéologues ont découvert des planches de bois qui appartenaient à un petit pavillon protégeant les deux défunts. Ce type de pavillon en bois (xiaozhang) dont la forme a été reconstituée a été aussi été retrouvé dans d’autres tombes Liao comme la tombe N° 1 de Yemaotai ou la tombe N° 3 de Daixintala. Ces tombes appartiennent à la phase initiale des Liao.
La structure en bois avait deux portes à deux battants dont les charnières ont été retrouvées. Un certain nombre d’objets a été découvert : des offrandes, des éléments de parure qui pouvaient avoir été cousus sur les vêtements, un couteau, des perles rondes et tubulaires en agate, des éléments de ceinture en fer et en bronze, etc.
Sur les restes humains, des fragments de tissu en soie ont été trouvés. La femme présentait une fragilité osseuse et les caractéristiques de quelqu’un qui avait porté des charges lourdes sur son dos, l’homme, grand et large, montrait une fracture mal ressoudée de l’ulna droit.

Tombe de Dongmengyi. Deux des murs de la structure en bois. ©P.Sebillaud

Tombe de Dongmengyi. Reconstitution du pavillon de bois (xiaozhang). ©P.Sebillaud

Reconstitution du pavillon (xiaozhang) en bois de cyprès de la tombe 1 de Yemaotai. D’après Nancy Shatzman Steinhardt

Sur les 240 tombes fouillées et publiées dans la région, 148 étaient construite en briques, parmi lesquelles 133 ont été attribuées à la période Liao, de même que pour les quelques tombes en pierre, 33 étaient Liao sur 36. La majorité des sépultures Liao appartient aux phases moyenne (première moitié du 11e s.) et tardive (deuxième moitié du 11e s. et début du 12e s.). La plupart des tombes en briques Liao sont de forme rectangulaire (29), ronde (32), octogonales (30) et carrée (23) sur un total de 129. En général, les tombes Liao étaient orientées vers le Sud-Est (68%) comme celles des Jin. Dans l’ensemble, on trouve une forte majorité de sépultures individuelles (64% pour les Liao), les tombes abritant deux individus sont moins nombreuses (30% pour les Liao) et les tombes multiples semblent être l’exception (5% pour les Liao et aucune pour les Jin). Sur les tombes individuelles où on a des informations sur le sexe des défunts (au total 46) la majorité sont des tombes masculines.

Tombe de Hamaqin. Porte. ©P.Sebillaud

Tombe de Hamaqin. L’intérieur de la chambre éet la plateforme. ©P.Sebillaud

Tombe de Hamaqin. Vue aérienne montrant la disposition des briques du dôme. ©P.Sebillaud

Pauline Sebillaud mentionne le fait que ces fouilles ont été réalisées dans des conditions de sauvetage, qu’il n’y a pas de budget pour conserver ces tombes et qu’en général, après la fouille, les fosses sont comblées.

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