Missions Etrangères de Paris
Jeudi 30 janvier 2014 : visite de la Société des Missions Etrangères de Paris commentée par M. Eric Henry.
Alexandre de Rhodes, missionnaire jésuite en Orient, se rend compte qu’après l’expulsion des missionnaires, les jeunes communautés chrétiennes restées sans pasteurs ne pourraient subsister sans prêtres locaux. Il convainc en 1653 le pape Alexandre VII d’envoyer trois évêques français volontaires, avec le rang de vicaire apostolique, en Asie dans le but de créer un clergé autochtone et de s’adapter aux mœurs et coutumes des pays.
Entre 1658 et 1700, on peut noter la fondation du séminaire général à Ayuthya, capitale du Siam, l’évangélisation du Tonkin, de la Cochinchine, du Cambodge et du Siam. Le travail des vicaires apostoliques et de la Société fut de fonder l’organisation des églises locales sur un clergé de prêtres et d’évêques locaux.
Le premier règlement, rédigé en 1710, définit la structure de la Société des Missions Etrangères de Paris : elle est une association de prêtres français mis à la disposition du Saint-Siège pour aller en mission sous l’autorité des vicaires apostoliques. Un changement interviendra en 1840, lorsque la Société acceptera aussi des séminaristes qui seront formés et incardinés dans la Société.
Le champ d’apostolat de la Société s’étendit au Sud de l’Inde, à la Corée, au Japon, à la Mandchourie, à l’Assam, à la Birmanie, au Tibet et à certaines provinces chinoises.
La révolution française créa une parenthèse dans la croissance de la Société des Misions Etrangères de Paris mais le XIXe siècle vit un essor considérable de ses missions.
Depuis le XVIIe siècle, la Société a envoyé en Asie près de 4 500 prêtres. Le séminaire de la rue du Bac est devenu aussi, récemment, un centre d’accueil pour les prêtres-étudiants asiatiques.
Installée en 1663 aux 126 et 128 rue du Bac dans des bâtiments cédés par Mgr Bernard de Sainte-Thérèse, évêque de Babylone, la société fera construire entre 1683 et 1691 une chapelle, puis deux hôtels particuliers de rapport, adjacents (118 et 120 rue du Bac). Le Grand Logis sera construit en 1732 et l’aile perpendiculaire sera ajoutée en 1869, l’ensemble donnant sur un grand jardin jouxtant l’Hôtel Matignon. Chateaubriand passera les dix dernières années de sa vie dans un des hôtels particuliers et ses obsèques seront célébrées dans la chapelle en 1848. Charles Gounod fut l’organiste de la chapelle de 1843 à 1848.
Carte montrant les différents pays où est implantée la Société des Missions Etrangères de Paris |
Façade sur cour du Grand Logis |
Façade de la Chapelle |
La crypte, sous la chapelle, abrite les reliques des martyrs des églises d’Asie sous un tombeau sur lequel est gravée l’impressionnante liste des noms des martyrs. En effet, les missionnaires connurent des persécutions aux XVIIe et XVIIIe siècles mais surtout au XIXe. Ils furent béatifiés et canonisés au XXe siècle. Ces persécutions, largement décrites en Europe provoquèrent pitié et colère et poussèrent la France et l’Angleterre à intervenir en Cochinchine et en Chine.
La salle des Martyrs se situe dans le prolongement de la crypte, à un niveau inférieur et expose sous trois grandes arches des souvenirs de ces prêtres martyrs. Au centre, telle une échelle dressée, se trouve la cangue de saint Borie, envoyée du Vietnam en 1843. Un tableau peint au Vietnam illustre le martyre de ce saint, décapité en 1838, pour son refus de se prosterner devant le mandarin. La cangue figure devant le saint agenouillé. D’autres tableaux relatent les arrestations et supplices de Saint Borie, Diem et Tu ou celles des saints Nam, Mi et Dich et d’autres encore.
Une des arches expose des objets (canne, flûte, lorgnette, etc.) ayant appartenu à des martyrs et différents insignes des vicaires apostoliques ainsi que quelques documents autographes. Une autre abrite des objets de piété mariale mais aussi des objets « clandestins » : une statuette de Kannon portant une croix sur la poitrine, un brûle-parfum japonais du XVIIe siècle décoré de croix et des grains du chapelet. Des croix de provenances diverses et des objets pour la célébration eucharistique sont aussi exposés. Sous la troisième arche sont montrés des objets personnels (robes tonkinoise, chinoises, bure tibétaine, baguettes) qui témoignent de l’adoption d’habitudes alimentaires et vestimentaires locales par les prêtres.
Trois grands meubles complètent le dispositif de la salle des Martyrs où sont exposés des photographies, essentiellement prises entre 1848 et 1880, montrant des groupes avant le départ ou diverses situations d’hommes en route ainsi que des lettres autographes.
La salle des Martyrs et la crypte se partagent la mémoire de ces prêtres-martyrs : l’une les souvenirs, l’autre les reliques.
La crypte et les photos de quelques martyrs du Vietnam |
La salle des Martyrs avec, au centre, la cangue de saint Borie |
Martyre de Saint Borie |